Bouquins

L'Autre, tome 1 de Pierre Bottero

Edition : Livre de poche
Collection : Rageot
Prix : 7,60 €

Résumé : Natan vit au Québec. Shaé, à Marseille. L'un est doué d'un talent fou, l'autre hantée par une Chose qu'elle ne maîtrise pas. Ils ont en commun un héritage fascinant et dangereux. Suffira-t-il à combattre l'Autre, terrifiante incarnation du Mal ?

Avis : Je ne sais que penser.
J'ai acheté ce livre avec la certitude qu'il me plairaît. Sans en avoir lu aucune critique. En me fiant à mon instinct de lectrice, au nom de l'auteur surtout. 
Pierre Bottero.
Fondateur du monde fantastique de Gwendalavir, auteur d'une série de trilogies époustouflantes, père de personnages chers à mon coeur, guide d'une passion pour la lecture dans mon enfance. 
Rien que ça. 
A sa mort, je m'étais promis "d'économiser" ses ouvrages tout au long de ma vie. J'ai tenu bon : 7 ans se sont écoulés depuis ma dernière découverte de l'un d'entre eux.

→ VOICI MA CHRONIQUE DE L'AUTRE, TOME UN

 Δ Spoilers rédigés en gris clair (ne t'y risque pas si tu ne l'as pas lu, ça pourrait être dommage)

Je me souvenais de Bottero pour son écriture si particulière : des phrases justes, lapidaires, puissantes. Ainsi ai-je été un peu perturbée par l'entrée en matière qu'il réservait au lecteur.

 Le pacte des MarchOmbres, tome deux, Elana l'envol
"La douleur infinie de celui qui reste
Comme un pâle reflet de l'infini voyage
Qui attend celui qui part."

L'Autre, tome un, Le Souffle de la Hyène
"Nathan comprit que la partie était perdue. L'équipe de Stanislas allait se contenter de faire circuler le ballon, jouant la montre, jusqu'à ce que l'arbitre siffle la fin du temps réglementaire." 


Disons qu'il m'a fallut un petit temps d'adaptation. Je me suis retrouvée face à des passages étonnants, parce qu'irréalistes : des jurons employés par des ados alors que plus usités depuis longtemps, le langage d'un personnage qui varie considérablement d'une page à l'autre, des répétitions (de prénoms surtout) assez récurrentes... Le genre d'erreurs que je ne m'attendait pas à trouver chez Bottero, que je considère comme un auteur jeunesse incroyable, pour ne pas dire L'auteur jeunesse (pour ma part en tous cas). 
ex : (Natan à un de ses amis : "D'ailleurs, j'ai beau apprécier ta compagnie, je te quitte." Le mec a 15 ans. Non.)

Après ce temps requis néanmoins, j'ai avancé de manière bien plus fluide dans ma lecture et l'ai pour ainsi dire dévorée. Comme le style ne m'a pas frappée, j'étais plus concentrée sur l'histoire en elle-même et je suis mitigée. Le départ est abrupt, laisse place après à une suite de péripéties dont on ne voit pas le bout. Le genre de bouquin que l'on sait pleins d'aventures, mais dont on a oublié les détails rien qu'en le refermant. Le genre de bouquin que j'adorais, gamine. Néanmoins, même gamine, je crois qu'il y a certaines choses que je n'aurais pas gobé. Comment dire : tout est... trop facile.
"Pas du tout, allez-vous me dire, il y a des scènes de combats toutes les dix pages, on voyage, on court tout le temps..." 
Oui. Certes. Et heureusement ! C'est ce qui est supposé tenir le lecteur en haleine. Parce que oui, en tant que livre fantasy, il fait le job. Mais ce sont des péripéties, des obstacles à la quête, pas de réelles difficultés.
○ Les façons dont les personnages passent d'un lieu à l'autre sont simplifiées, voire omises.
○ La fin du monde. On ne ressent rien puisque les personnages eux-mêmes ne sont pas une seule fois affectés par les catastrophes naturelles ; "comme elle, il avait entendu les nouvelles à la radio. Les événements dramatiques qui se succédaient à une vitesse croissante [...] lui avaient noué le ventre"
○ Des adolescents qui réalisent des exploits lorsque des milliers d'hommes expérimentés ont échoué
"As-tu conscience qu'il y a trente siècles de cela tes ancêtres étaient plus de mille pour tenter ce que tu prétends réussir seule, et qu'ils ont échoué ?" dit un personnage à un moment de l'histoire. Ce moment où... Bon bah, l'auteur écrit le truc mais... ne saisit pas.
○ Le coup de foudre. Quel dommage ! "Natan sursauta, comme piqué par une flèche invisible. Rien n'était parfait dans le visage de cette fille, pourtant il dégageait une grâce sauvage et envoûtante, à commencer par ses yeux, si noirs que leurs pupilles s'y noyaient, parfait miroir de sa chevelure d'ébène." Vous conviendrez que c'est assez niais.

D'après moi, l'un des soucis majeurs de cet ouvrage est la vitesse à laquelle les faits se produisent :  ça ne nous laisse le temps d'analyser la situation, ce qui nous rapproche des héros, perdus, mais la rapidité du flux nous éloigne aussi d'eux, on ne peut pas prendre le temps de les connaître. Je n'ai pas su apprécier Natan, qui, pour un personnage principal m'a semblé manquer de profondeur et de charisme. De plus, j'ai un réel soucis avec les personnages parfaits. Et je vous laisse profiter de la première description que l'auteur nous fait du héros : 
"Le type, un grand costaud qui lui rendait au moins trente centimètres, tenta de franchir le barrage. Natan se baissa, l'esquiva sans peine et se dégagea. Il se déplaçait avec une rapidité sidérante, le ballon collant à sa main comme s'il était un prolongement de son corps. [...] Il avait déjà inscrit douze paniers pour son équipe, mais cela ne suffisait pas. [...] Natan chercha ses partenaires des yeux. Aucun n'était en position de shoot. 
Il s'y attendait. 
Arthur, le seul qui, selon Natan, jouait de manière potable..."
Comment vous expliquer que j'ai faillit péter un cable au cours du roman ? Je trouve seulement qu'à eux deux, les héros concentrent beaucoup trop d'atouts. (C'est vrai, posséder 6 septièmes des pouvoirs les plus puissants au monde, rien que ça...) Un peu comme si l'on avait écrit sur la quatrième de couverture quelque chose comme :
 "juste assez de frissons pour arrondir les yeux mais, ne vous en faîtes pas, tout se finira bien, quoi qu'il se passe."
 Cela pose un soucis pour le lecteur, qui ne peut pas s'attacher : on aime les personnages, parce que, quelque part, ils nous ressemblent, qu'on se sent proche d'eux. On s'accroche à leur défauts, et on se reconnaît dans leurs faiblesses. Et si Shaé est parfois prise de mouvements d'humeurs, c'est bien la seule. Dommage.

Je dois pourtant reconnaître que le livre s'appuie sur des bases solides, comme l'attestent les indices semées à travers les pages, la "découverte" de l'héritage des personnages, et surtout, une paire de personnages intéressants :
Rafi, pour commencer, dont j'ai adoré le rôle énigmatique, l'omniprésence et les secrets qu'il garde. Ses paroles mystérieuses ajoutent selon moi un nouvel aspect et confère à l'intrigue.
Elona ensuite, qui, bien qu’exécrable m'a parut savamment dosée. Juste assez pour être  insupportable. J'espère qu'elle jouera un rôle plus important dans les tomes suivants.



Pour conclure, ce premier tome fut une déception pour moi qui plaçait la barre très haut. L'histoire est sympathique mais l'écriture, les personnages et le rythme sont loin d'être incroyables. Si vous n'avez pas encore découvert Bottero, je vous conseillerais davantage La Quête d'Ewilan, qui, les fans de cet auteur pourront attester, est une petite pépite de poésie.

En trois mots : Familles / Aventures /  Enfantin
Note : ☼☼
N'hésitez pas à me laisser vos avis en commentaire, je serai ravie de les lire !

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